Interview d’Eldiablo pour la sortie de son nouvel album BD : Bellicus ! (par Sacha)

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Interview d'Eldiablo pour la sortie de son nouvel album BD : Bellicus !

Boris Dolivet, alias Eldiablo, est l’un des créateurs de la série animée française phare des années 2000, Lascars, qui racontait sans filtre et avec beaucoup d’humour noir les mésaventures de jeunes des quartiers. Il a également participé à la création du dessin animé Les Kassos, où une assistante sociale rencontre des personnages de notre jeunesse, pas toujours au top niveau, mais bien décérébrés et sans limites !

Mais son tableau de chasse ne s’arrête pas là : ayant réellement démarré sa carrière dans les années 90, Eldiablo a touché à tout ! Graffiti, hip-hop, presse satirique, long-métrage… Boris Dolivet est une planète à lui tout seul, avec un univers immense à partager !

Récemment expatrié au Canada, il continue à réaliser des projets en France. Pour revenir à notre sujet du jour, il vient de faire paraître son nouvel album de BD « Bellicus », en partenariat avec l’illustrateur Pierre Ferrero, aux éditions Massot. L’histoire se déroule à la Préhistoire et suit Raoul et Koska, deux personnages très différents : un artiste et une guerrière, qui se retrouvent embarqués dans une quête de vengeance. Accompagnés « d’un zoologue de l’espace », ils partent à la rencontre de sociétés humaines inconnues et vont se confronter à des problématiques encore aujourd’hui bien d’actualité : xénophobie, fanatisme, racisme, misogynie, cupidité, etc…

Merci à lui d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Nous espérons que cette interview vous donnera envie d’aller plus loin et de découvrir le nouvel album BD d’Eldiablo !

1 – Tu es actif depuis la fin des années 80, notamment dans le milieu du hip-hop et du graff’. Pour beaucoup de gens de ma génération, tu es surtout connu comme l’un des cinq créateurs de la série d’animation Lascars, dont plusieurs péripéties s’inspirent directement de ta propre vie. Tu as même confié avoir perdu « de nombreuses bastons de regards ». Pour ceux qui te découvriraient aujourd’hui, peux-tu te présenter brièvement et nous raconter tes débuts dans le graphisme et l’animation ? Tu as aussi été publié dans des journaux comme Psykopat ou Charlie. D’où te vient ce goût prononcé pour la satire et cet humour noir, si caractéristique de tes œuvres ?

J’ai grandi en banlieue dans les années 80, biberonné de culture BD et ciné, et à partir de l’âge de 12 ans, Hip-Hop. Toute mon œuvre découle de ce cocktail. Les premières BD que je publiais, c’était dans Psikopat au tout début des 90’s. J’y racontais déjà mes petites et grandes galères de jeune banlieusard.
Que ce soit par le biais du graffiti, du dessin, de la BD ou du ciné, je me suis toujours positionné en reporter de ma réalité. Même à présent que je touche à d’autres univers (Sci-Fi, fantastique, etc.), je mets toujours beaucoup de ce que je perçois du monde qui m’entoure dans mes œuvres. Concernant mon goût de la satire, je préfère toujours rire que pleurer des aléas de l’existence, un peu comme le faisaient Reiser, Crumb ou Shelton. Ça me vient assez naturellement, on va dire que c’est mon point de vue sur le monde : jamais trop sérieux, mais toujours conscient.

2 – Tu as collaboré sur de nombreux projets de BD, tantôt comme scénariste, tantôt comme illustrateur, et parfois en cumulant les deux rôles. As-tu une idée du nombre d’albums sur lesquels tu as travaillé au fil de ta carrière ? Peux-tu nous en présenter quelques-uns, avec un focus sur ceux qui t’ont le plus marqué ? Quelques mots sur les auteurs et illustrateurs avec qui tu as travaillé : travailles-tu régulièrement avec certains d’entre eux ?

Je comptais récemment, j’en suis à peu près à 26 albums. Je mets toujours beaucoup de cœur dans ce que je fais. Néanmoins, mes créations les plus marquantes (si je dois en choisir trois), on va dire que c’est la trilogie Monkey Bizness (avec Pozla), qui sous couvert de grosse blague post-apo reflète quand même pas mal mon angoisse de l’avenir et de la catastrophe écologique qui s’en vient.
Je pense aussi à la série Un homme de goût (avec Cha), qui à travers les tribulations d’un ogre qui vit caché au sein de notre société, interroge l’animalité qui est en chacun de nous. C’est un de mes thèmes récurrents, d’ailleurs, c’est aussi la thématique principale de mon dernier bébé Bellicus.

Extrait de l'album "Bellicus"

3 – En parallèle de tes projets en BD, tu as également écrit des scénarios pour des films et des séries. Peux-tu nous citer quelques-unes de tes créations audiovisuelles et nous parler des thèmes qui te tiennent à cœur dans ce format ? Où peut-on les découvrir ?

On peut citer évidemment Lascars, les séries et le long métrage, qui sont le cœur de mon travail. Mais je ne suis pas le seul auteur, on est une équipe de cinq, toujours les mêmes depuis 25 ans.
Plus récemment, j’ai écrit la série fantastique Caro Nostra, que tu peux retrouver sur France Télé Slash : l’histoire d’une famille d’ogres qui s’installe à Paris et qui ouvre un restaurant.
Et puis bien sûr, la fameuse série Les Kassos, qui à ce jour comptabilise des centaines de millions de clics. Ah, si seulement j’avais pu toucher ne serait-ce qu’un centime d’euros par clic.

 

4 – À la même époque que la diffusion de la série Lascars, le collectif Kourtrajmé oeuvrait pour promouvoir la contre-culture des banlieues parisiennes avec des courts-métrages surréalistes, sans filtre et parfois violents, en réponse aux clichés mé(r)diatiques et politiques. Étais-tu proche de ce collectif ? Peut-on dire que Lascars s’inscrit dans le même courant artistique qui a marqué les années 2000 ?

Alors, Kourtrajmé a commencé quelques années après nous. On va dire que la série Lascars en était déjà à sa saison 2 quand ils ont commencé à cartonner avec leurs courts-métrages. Il y a évidemment un lien de parenté, dans le sens où ils se servaient du même matériel de base pour être large, on va dire la culture de rue.
On les connaît évidemment, mais on n’a jamais bossé ensemble, et on n’a pas suivi exactement le même parcours artistique. Je dirais que les deux univers sont complémentaires, mais pas en compétition. Heureusement, il y a de la place pour tout le monde dans le monde artistique. Kourtrajmé, comme Lascars, a su lancer une vraie licence, une marque que tout le monde reconnaît.

5 – Au mois de janvier est paru Bellicus, le dernier album que tu as scénarisé, illustré par Pierre Ferrero et publié aux éditions Massot. Avant de nous parler de l’album, peux-tu nous présenter l’illustrateur avec qui tu as collaboré ? Qu’est-ce qui t’a donné envie de travailler avec cet artiste en particulier ?

Pierre Ferrero est un auteur dont j’ai découvert le travail sur son album Cauchemar. Son travail m’a tout de suite intéressé, aussi bien graphiquement (j’adore son trait et sa façon de mettre en scène) que philosophiquement. Comme moi, il est très engagé socialement et politiquement. On est tous les deux des militants de gauche, très concernés par l’état du monde actuel, et on se reconnaît vraiment l’un l’autre dans une vision du monde assez radicale et humaniste. Je lui ai déjà signifié qu’on se refait un album ensemble quand il veut.

Eldiablo et Pierre Ferrero au Festival d'Angoulême

 6 – L’histoire de Bellicus suit deux jeunes hominidés préhistoriques : Raoul, doté d’une sensibilité artistique, et Koska, une chasseuse téméraire et guerrière. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ces deux héros et ce qui les rend uniques ? Dans les résumés disponibles en ligne, on apprend qu’ils sont liés par une quête de vengeance. Sans trop en dévoiler, pourrais-tu nous donner quelques éléments de l’intrigue et ce qui unit les deux personnages ? Pourquoi avoir situé l’histoire à la période préhistorique ?

Alors déjà, j’ai toujours voulu écrire un roman préhistorique. La Guerre du Feu, notamment, m’avait vraiment marqué dans ma jeunesse, et je m’étais juré d’écrire moi aussi mon récit d’hommes des cavernes. Ce que je trouve fascinant, c’est que malgré des millions d’années d’évolution, Homo sapiens ressemble encore à mort à ses ancêtres… La civilisation, la technologie, etc. Tout ça ne nous éloigne pas tant que ça des motivations primales des australopithèques : se nourrir, se mettre à l’abri du danger, se reproduire…

Effectivement, Bellicus est un récit de vengeance, mais ce n’est que le prétexte pour faire voyager ensemble ces deux personnages que tout oppose : Raoul est un artiste, un brin misanthrope et parfois un peu lâche, alors que Koska, la cheffe des chasseurs, est violente et psychorigide. Au cours de leur périple, ils vont tous les deux évoluer, et les lignes qui les séparent vont lentement s’atténuer. Parallèlement, ils rencontrent de nouvelles sociétés dont ils ne connaissent rien et qui fonctionnent très différemment de la leur. Le récit est un reflet de la société humaine moderne.

7 – L’album semble aborder des problématiques sociétales contemporaines telles que le racisme, la misogynie, la guerre, le fanatisme, etc. Peut-on le considérer comme une BD d’aventure (pré)historique, une critique sociale, ou les deux à la fois ? Est-il destiné à un jeune public ou s’adresse-t-il plutôt à un public adulte et averti ? L’humour noir, propre à tes récits précédents, est-il toujours présent ?

C’est à la fois un récit d’aventure et un conte philosophique, qui interroge nos travers, malheureusement partagés par une grande majorité de l’humanité. Je dirais qu’il est plutôt destiné à un public averti, même si, personnellement, je lisais ce genre d’histoires dès l’âge de douze ans. Mais peut-être que je suis un peu spécial.
Évidemment, l’histoire comporte une grande part d’ironie et d’humour, malgré des péripéties et aventures parfois très dures. Mais le monde n’est-il pas dur ? Encore une fois, mieux vaut prendre le parti d’en rire.

 

8. Quelques mots sur l’éditeur ? Est-ce ta première collaboration avec cette maison d’édition ?

Florent Massot est un éditeur engagé qui publie toujours des ouvrages qui ont du sens. Historiquement, c’est lui qui a cru en Virginie Despentes en premier, ce qui n’est pas rien. Cela fait trente ans qu’on s’était promis de travailler ensemble un jour. Ce livre a été la parfaite occasion.

 

9. Et pour conclure, où pourra-t-on retrouver ton dernier album Bellicus aux éditions Massot ? Est-il disponible sur internet, en librairies, ou ailleurs ?

Le livre est disponible dans toutes les bonnes librairies et sur les plateformes de vente en ligne.

 

Pour commander l’album « Bellicus » directement sur le site de l’editeur :

https://www.librairiemassot.com/products/bellicus

 

Propos recueillis par Sacha

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Extrait de l'album "Bellicus"

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