A voir ailleurs : Loreto; Deux démons et des communautés indigènes d’Amazonie menacées (par Quisca Producciones)

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Une analyse de la progression de la pandémie dans la région amazonique nord du Pérou, par un journaliste indigène de la Radio Ucamara, un des plus important médias de communication sur le fleuve Marañon, région de Loreto. Pour les Kukamas, le « maisangara » ou les esprits démoniaques sont représentés aujourd’hui par le COVID-19 et l’abandon par l’état du peuple indigène d’Amazonie.

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Par Leonardo Tello Imaina, Directeur de Radio Ucamara

Dans ce monde Amazonique, des peuples indigènes et non-indigènes, de différentes nationalités, vivent ensemble entre le gouvernement et les démons et esprits qui régissent l’harmonie de la nature. Les problèmes de l’Amazone sont durs à affronter car ils sont souvent innommables; peuvent prendre plusieurs noms et plusieurs formes, particulièrement ceux qui blessent le plus et génèrent les plus grands traumatismes pour la population. Chez les Kukamas, on appelle « maisangara » tout les maux qui nous affectent. Par le temps, le mot a pris pour définition l’invasion de nos terres, la pollution, l’indifférence du gouvernement, et l’arrivée de nouvelles maladies, comme le COVID-19.

Un virus qu’on ne peut pas voir a retourné le monde. Quand cela arrive, en recherche des solutions pour avancer, on peut rencontrer d’autres problèmes, en Amazonie, ils sont personnifiés par le gouvernement. Le gouvernement appelle le peuple indigène des citoyens, mais en réalité, ils ne nous ont jamais pris au sérieux. Ils nous ont abandonnés.

Les fuites de pétrole et les esprits sombres qui les représentent, l’invasion et les agressions des communautés par le « pela cara » qui signifie littéralement écorcheur de visage et représente les étrangers qui usent de la violence pour envahir les territoires indigènes, les communautés appauvries et le démon de la faim, le gouvernement et son système tentaculaire qui étouffe les populations indigènes, au milieu de tout cela, nous avons maintenant le COVID-19. La réponse au virus inclut la corruption, attire ceux qui viennent prendre avantage du malheur des autres, la négligence du peuple indigène par le gouvernement qui les appellent citoyens, mais qui ne les a jamais pris au sérieux quand il a fallu prendre des décisions qui vont dans leur sens.

Il y a un besoin urgent de changement d’attitude, transmettre un sens d’humanité qui nous permet de nous voir chacun comme frère et soeur. Permettre à tous d’avoir une vie décente, une vraie justice plutôt que des documents. A la station radio on a pu interroger les habitants des communautés sur leurs rêves, et beaucoup font les mêmes rêves que leurs grands parents ou leurs ancêtres à l’époque de l’exploitation du caoutchouc, ou durant l’épidémie de variole. La peur est revenue.

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Cet article a été publié en espagnol dans la revue Péruvienne en ligne « Ojo Publico » le 2 juin, 2020. Traduction de Mario Auburtin

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