La Plume du Coq : Vipère à point
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La Plume du Coq s’acoquine avec Foutou’art pour nous régaler de leur prose débridée, leur philosophie mordante et leur écriture à mourir de rire, grivoise et sans filtre ! Un grand merci à eux pour ce vent de fraîcheur créatif dans nos colonnes.
Si leur texte vous a fait hurler de rire, foncez sur leur site pour plonger dans un univers aussi barré qu’inspiré, avec une patte littéraire affûtée comme jamais !
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Vipère à point
Vous connaissez l’histoire ? C’est une blague, elle est fameuse. En pleine
randonnée, un gars fait un écart pour pisser. Malheur lui en prit, car à peine eut-il sorti
son sexe, qu’un crotale apeuré (par le ressemblant ennemi, sans doute) lui donne un
coup de croc. Aïe ! Terrible morsure que voilà. Alors, se tenant les parties tendres, il
court rejoindre le compagnon de route qui l’attendait sur le sentier, afin de le mettre au
courant du problème. « Que faut-il faire ? » se demandent-ils l’un l’autre, jusqu’à ce que
la victime ait enfin une bonne idée : « Mon cher, appelle donc un médecin, il nous dira ce
qu’il en est. » L’autre, gentil camarade, compose le numéro, et entame avec les urgences
une courte discussion :
– Oui Monsieur, c’est pour ?
– Une morsure de serpent !
– Quel genre de serpent ?
– Du genre crotale !
– C’est un genre venimeux. Il vous faut immédiatement sucer la plaie. Et l’autre, inquiet :
– Alors, que disent les docteurs ?
– Rien, ils disent que t’es foutu, répond-il en raccrochant.
Ahah ! On rigole, et mon copain Jeannot, il a bien rigolé quand je lui ai raconté.
Mais, déjà quelques secondes après avoir ouï la chute, je le voyais réfléchir.
Manifestement, il trouvait à ces balivernes un aspect bien plus pratique
qu’humoristique. Et effectivement, quand je le rencontrai une semaine après, il en avait
une encore plus drôle pour moi.
– Jeannot, alors ? Et ce week-end à la montagne ?
– Ah ! Mon ami, tu vas rire. Tu te rappelles cette histoire drôle avec le serpent ?
– Certes, et son « ressemblant ennemi » !
– J’ai peut-être pris l’histoire pour plus vraie qu’elle ne l’était…
– Il m’a semblé, effectivement. Pourquoi donc, mon Jean-Jean ?
– Je vais tout te dire… Vois-tu, c’est que le lendemain, j’avais un rendez-vous galant, avec
une gente dame. Et pour cette troisième fois que nous nous rencontrions, nous avions
choisi d’aller marcher vers les sommets des Pyrénées. La balade jusqu’au Pic d’Ossau
est superbe, et puis… On peut bivouaquer. J’escomptais donc profiter d’une nuit en
pleine nature, seul avec ma superbe conquête. Enfin… « conquête », le mot n’était juste
que prononcé à la hâte. Hélas ! La délicieuse vierge était farouche ! Elle m’avait bien
prévenu : « Monsieur Jeannot, si vous voulez me faire des cochonneries, d’abord, vous me passerez quelque chose à l’annulaire. »
La veille de cela, tu me racontais ton histoire de serpent, et après m’en être délecté, je me décidai à l’employer, non pas pour faire rire la demoiselle, mais pour… un tout autre projet !
– Je crains que… Oh…
– Quoi que tu craignes, tu es loin du compte. Aussi, je continue. La journée était magnifique ! Le temps : d’un clair ! Et le vent ? Quel bon air ! Il faisait chaud, et ma petite compagne avait choisi des vêtements légers. Dieu que j’avais hâte d’atteindre le Pic ! Nous fîmes une randonnée agréable, et une fois là-haut, nous montâmes un campement mignonnet : un tout petit feu, bien enrobé de pierres, du plus discret effet, et tout près, notre tente. Une seule tente pour deux, cependant, deux sacs de couchage dans la tente. Elle acceptait de passer la nuit sous mon escorte, mais… point n’y touche.
– Pauvre Jeannot !
– Pauvre, oui ! Pauvre, bien sûr ! Alors ? Moi ? Je pensais au serpent ! Après avoir passé une charmante soirée, nous nous décidâmes à dormir, et je prétextai enfin d’aller uriner, préalablement à tout sommeil. Discrètement, j’emportais une agrafeuse, afin, tu t’en doutes maintenant, de me simuler une morsure sur la verge…
– Je m’en doute maintenant… Et obtenir une crapuleuse succion sur ton roublard de dard…
– Mea culpa. Mais… si seulement… Alors que j’allais pour m’agrafer la quique, que j’étudiais pour en trouver l’endroit juste, un taon – énorme – vint se poser sur l’objet de mon forfait.
*À ce moment de l’histoire, Jeannot s’arrêta un moment pour souffler, les yeux dans le vide. Un silence étant passé, il reprit le cours de son récit.*
Vois-tu, le problème avec les taons, c’est que ça pique. Et, vois-tu, le problème avec les piqûres de taon, ce n’est pas la douleur – qui, soit dit en passant, est atroce – c’est le gonflement de la zone meurtrie. Ça enfle à une vitesse… Je me suis donc tout naturellement mis à hurler. Tu comprendras que les raisons étaient multiples : le choc, le mal, et puis le trouble…
Forcément, la demoiselle accourt. C’est ici qu’intervient l’ironie : elle était totalement nue. C’est en fille qu’elle avait gravi la montagne, c’est en tant que femme qu’elle comptait la redescendre. Enfin, là n’est pas la question : pour le moment, elle s’inquiétait…
Moi, terrifié, je me retournai en tenant ce qui n’était naguère que mon pauvre petit appendice, et qui avait désormais l’allure d’un monumental démonte-pneu, difforme et démesuré. Alors, ma chétive amie, peu renseignée sur ce sujet, découvrit la chose et, rien qu’à l’idée – qui lui traversait l’esprit – qu’elle allait devoir en être traversée, défaillit. Elle tomba, cul par terre sur le sol, en lâchant un blasphématoire « doux Jésus » dans son souffle coupé.
Or, ledit cul était nu, et les Pyrénées, figure-toi, ne sont pas exemptes de serpents. Il vit, notamment, les fameuses vipères seoane qui raffolent du temps chaud, et qui exècrent les anus béants qui leur tombent dessus inopinément. D’où… une morsure, à l’endroit décrit…
– Doux Jésus… Et ce serpent, est-il… venimeux ?
– Il l’est… Et, pire encore, il porte un poison d’un type particulier : diarrhéique. Et, crois-moi, plutôt fulgurant.
– Seigneur ! Et donc, tu as appelé les médecins ?
– Non ! À cause de ta maudite blague, je connaissais le remède… Mais, elle, elle n’avait pas entendu cette blague ! Tu penses bien que je ne lui avais pas racontée avant d’essayer de me faire sucer par stratagème !
– Seigneur… Et donc… Une question demeure… Est-elle vivante ?
– Oui… Même, elle m’a dit qu’au vu des circonstances, j’avais dû mal comprendre le sens du mot « annulaire », mais parfaitement celui de « cochonnerie »… On se marie dans trois mois !