Poésie expérimentale : « Inventer l’Amérique » (par Grégoire Damon)
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Inventer l’Amérique
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– une vie quotidienne de Donald Trump –
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14 JUIN 1946 – NEW YORK
Petit gif de Duck
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Nous n’étions que des enfants
en train de bâtir la démocratie du futur
des Indiens çà et là
grelottaient sous des couvertures ―
les voies étaient dégagées.
De temps en temps un frère coyote
nous recommandait à la lune
alors
Donald levait vers le ciel sa face :
L’avenir est là
comme un enfant juché sur un lion en peluche géant.
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Pas de liberté sans Smith & Wesson
dit un proverbe chinois du VIème siècle.
Donald est là-haut
au sommet de la montagne de verre.
Statique.
Pas un de ses cheveux n’est troublé par le vent.
…
Cette montagne s’est nourrie d’alpinistes.
Cette montagne s’est nourrie de fuyards.
Cette montagne a grandi, s’est épanouie,
s’est élargie,
Cette montagne a roté et a fait un petit somme.
La viande de notre grande Connerie,
de notre grand Espoir
a fait de cette montagne ce qu’elle est.
Au sommet, Donald médite.
Nous ne savons pas.
Nous ne savons pas ce qui au font s’agite.
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Là-haut
quand Donald pense
les proverbes tombent un à un sur ses épaules
en silence
comme des pellicules.
…
Il n’y a jamais de silence dans ce que vous faites.
La peur a gagné vos cœurs
elle a secoué la Bourse à de nombreuses reprises.
Les modes ont changé depuis les années 70.
Vous avez grossi
vos cheveux sont tombés.
Dans les réserves
les têtes des Indiens sont restées les mêmes
hirsutes
sur des corps obèses.
Seul Donald ne grossit pas
en-dedans.
…
Une tour de verre
n’est pas assez.
Il y a trop de poésie en Donald.
Il porte en lui toutes les démesures que vous ne vous accordez pas.
Il ne
se ment pas.
…
Nous n’étions que des gamins
en train de bâtir l’urbanisme du futur
seul Donald n’attendait pas le XXIème siècle
pour être du XXIème siècle.
…
Loin les intellectuels
loin les homosexuels
loin les auteurs de films d’auteurs
loin les artistes Juifs new-yorkais
et leur penchant pour la bande dessinée.
On n’invente pas Donald.
On ne caricature pas
on n’est jamais révolutionnaire
on existe
si peu.
Tout ce que vous voyez tout ce que vous ressentez tout ce que vous créez
n’est que le rebut
d’un ancien rêve de Donald.
…
Nous n’étions que des gamins
affolés de toucher nos premières Winchesters véritables.
L’avenir sentait le soleil
le cheval
et la sueur.
Trois gouttes d’urine arrivaient à notre front
par un hasard joyeux du vent.
Donald déjà
si haut.
…
Lorsque la montagne s’est aplatie subitement
Donald était à cheval dessus.
Pourtant il n’y eut que lui pour vous exhorter à rebâtir.
Vous, vous préfériez le deuil.
Vous, vous préférez la nostalgie.
…
Un jour,
Donald décida d’être la montagne.
…
Les mots
vous paraissent durs, exagérés, caricaturaux.
Les sentences
vous semblent mortes.
On dirait un vieux film
exploité directement sur les chaînes du câble.
Il y a quelque chose
que vous ne comprenez pas.
Le monde et sa saveur
tout ce que vous n’avez pas senti
tout ce que vous n’avez pas vu.
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Nous n’étions que des enfants
mais quel que fût notre effort
pour terrasser la Frontière
Donald était déjà là.
Nous chargions les carrioles
Donald était au-delà des Rocheuses.
Nous posions les premiers rails du cheval de fer,
Donald nous attendait – à l’étape
il avait ouvert
un casino et un dinner.
Et un salon de massage à la gare terminus.
Quelque fût notre effort,
Donald était
un peu plus à l’ouest.
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L’Inde : Donald.
La Chine : Donald.
L’Indonésie devient compétitive : Donald.
Cuba : Donald.
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Reste ce bout neigeux de la Corée.
Donald y travaille.
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Dans une petite école du Minnesota
on a affiché une frise du temps
décorée de la main des enfants.
Du XIXè à la fin du XXIIè siècle : Donald.
Après, l’école manquait de murs.
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Donald, vous me rendez folle
ces draps sont de soie véritable
comme vos bottes sont crottées
Ô Donald Donald
vous me faites mourir.
…
(et avec ça
quand un poète français sous l’impulsion d’un poète belge
écrit un poème sur Donald
ces deux-là restent persuadés
que la France et la Belgique
existent)
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Nous n’étions que des gamins
mais déjà nous savions :
nous ne sommes pas des cow-boys
nous sommes des entrepreneurs
le bruit des éperons c’est juste
une particularité innée.
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Quel réalisateur assez audacieux
serait aujourd’hui capable
d’inventer l’Amérique ?
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1er janvier – 1er octobre 2015 :
264 fusillades de masse.
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Il y en a qui disent : dada.
Il y en a qui disent : Ubu.
Il y en a qui ont besoin de se raccrocher
à de vieilles formules magiques
pour classes de terminale.
Donald, lui, parle.
Et les choses sortent de lui, naturellement.
Et on tire.
Et on décroche 20.000 $ à la roulette.
Et le minibar est bien rempli.
Les Indiens en chechia lancent leurs youyous
et bouillonne notre testostérone.
Nous sommes
de retour.
…
…Donald regarde l’Amérique
l’Amérique regarde Donald…
…et à la fin
ils s’embrassent dans le soleil couchant.
FIN
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INVENTER L’AMÉRIQUE
Un film de Grégoire Damon.
D’après une idée originale d’Éric Dejaeger.
Scénario : William Frederick Cody.
Dialogues : Quentin Tarantino.
Donald : Sylvester Stallone.
Regard acier de Donald : Bruce Willis.
La Frontière : Kim Jong-un.
Le World Trade Center : Barack Obama.
Doublure scènes d’amour : Brad Pitt.
Doublure cheveux : Lady Gaga.
Doublure joues : Brice Hortefeux.
Effets spéciaux : Smith & Wesson.
Musique : Jesse Hughes.
Aucun chef d’État européen n’a été blessé pendant le tournage.
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Grégoire Damon
Son site : http://gregoiredamon.hautetfort.com/
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